jeudi 23 septembre 2010
J'ai longtemps marché dans la nuit,
Tu connais mes balades nocturnes,
Tu sais tout de toute ma vie,
Toi comme mon ombre.
J'ai marché avec ma solitude
Que vous étiez bien seules à voir,
Vous êtes venues par habitude,
Vous comme mes ombres.
Mon ombre, ma nuit, mes peurs,
Tu ou vous, je ne sais plus bien
A qui ce si lent air ment.
Vient toujours un moment
Où je ne sais plus rien.
J'étais perdue en quête d'une moitié,
En vous, en toi. Viens à mes côtés,
Mes solitudes, tu m'as charmée :
Vous savez te faire aimer.
J'ai isolé mes pas des tiens,
Mais toi aussi perdais le lien
De toi à moi, de moi à vous
Mes solitudes : vous savez te faire aimer.
Mon ombre, ma nuit, mes peurs,
Tu ou vous, je ne sais plus bien
A qui ce si lent air ment.
Vient toujours un moment
Où je ne sais plus rien.
Près d'une ombre comme toi,
J'ai compté mes pas, tu sais
Qu'il y aura d'autres "toi"
Cachant mon ombre et mes secrets,
D'autres "vous" pour m'accompagner.
Car tu connais mon vrai secret,
C'est le don que mes solitudes ont
De ne pas s'épuiser mais se multiplier.
Mon ombre, ma nuit, mes peurs,
Tu ou vous, je ne sais plus bien
Ce que me font ces longs errements.
Vient toujours un moment
Où je n'en sais plus rien.
mardi 21 septembre 2010
J'ai mis très longtemps à le comprendre, presque 20 ans. Mes parents s'aiment, mon père aime ma mère, ma mère aime mon père. J'ai mieux même : 0uahiba et AIain s'aimaient déjà, bien avant ma naissance.
Mon père et ses tâches de rousseur, je n'ai jamais su s'ils avaient eu d'autres petites amies avant ma mère. Je l'imagine tellement timide et introverti que j'ai du mal à l'imaginer en séducteur. D'ailleurs, je ne pense pas qu'il le soit : il est plutôt de ceux dont le but est de se fixer avec quelqu'un et de vivre un long fleuve tranquille. Il avait 23 ans quand je suis née, donc je crois qu'il a rencontré ma mère à peut-être 20 ou 21 ans, ce qui me paraissait normal quand j'étais petite, mais si terriblement jeune maintenant. Le jour de mes 23 ans, il m'a même fait remarquer "tu as l'âge que j'avais quand tu es née".
Il n'a jamais manqué d'anecdotes sur cette période. Par-rapport au nombre d'années, on dirait parfois qu'il n'a vécu qu'entre 18 et 22 ans, entre son échec au canard à l'orange et ma naissance. Il raconte souvent les petits boulots qu'il a enchaînés, me fait revivre le 18e, à travers les hôtels que ma mère a écumés et où il venait la voir. Mais le plus gros de ses anecdotes, c'est "ChezFolet", un patron d'agence d'intérim en restauration. C'est là qu'il a rencontré ma mère. La seule phrase qu'il a eue un jour, il y a quelques années, à propos de cette rencontre, disait en substance : "ah ben ta mère... c'était un rêve". Tu m'étonnes, you redhead, freckle-faced, mama's boy. Ca devait vendre du rêve de fréquenter une jeune fille qui attire les gens comme le miel et les abeilles, et qui vient de loin, Algérie et Normandie, alors que lui n'avait vécu (et n'a toujours vécu) qu'à Montreuil.
Je trouve mon père si mignon dans cette histoire que j'ai envie de dire "laaapiiin" parfois. Ca vaudrait sûrement la peine de faire une petite enquête sur les prédécesseuses de ma mère...
dimanche 12 septembre 2010
J'ai connu une des dernières stalinistes en France, et c'était ma grand-mère. La première fois où je suis allée à la fête de l'Huma, je devais avoir 8/9 ans. C'était avec mes parents et ma grand-mère paternelle. Je me souviens avoir découvert à cet âge que la pluie tombait de manière traditionnelle le deuxième week-end de septembre, les pieds dans la boue, alors que ma grand-mère avait prévu les bottes. Oui, elle y allait chaque année, elle faisait même bien plus. Elle vendait l'Huma, elle militait pour le Parti, elle était bénévole dans l'Association d'amitié franco-vietnamienne de Montreuil. Le tableau qui est dans mon salon lui appartenait auparavant, en hommage aux révolutionnaires, extraits de Victor Hugo à l'appui. Elle est la militante la plus animée que j'ai connue, et surtout la première féministe de mon souvenir, même avant ma mère peut-être. De tout ça, je tire la chance d'avoir eu une grand-mère communiste.
Ca a façonné mon enfance, en un sens. En 1995, quand la plupart des mômes de 8 ans savent à peine le nom du président, je savais le nom de tous les candidats, je savais ceux de droite et ceux de gauche, et je savais que mes parents avaient voté pour Robert Hue au premier tour. Quand les 8% étaient apparus à la télé, j'avais découvert que mes parents étaient minoritaires. Je crois que je suis née en sachant ma droite de ma gauche, en fait, mais il m'a fallu quelques temps pour comprendre de quel côté se trouvent les vainqueurs de la politique.
Mais droite, gauche, droite, peu importent les gens au gouvernement, ma mémoire est pavée de souvenirs de manifs. La première dont je me souviens, même si je n'y étais pas allée, fait partie du mouvement de l'automne 95. Une des très rares fois où mon père est allé en manif : il avait détourné un message de prévention contre le Sida, en collant la tête de Juppé sur le corps de l'homme en photo, et avait écrit "Juppé" à la place du mot "Sida". Ambiance Hara-Kiri et professeur Choron à la maison. Quelle famille centriste, quelle famille de droite offre une telle atmosphère ? Quel intérêt à la culture de droite, à part les dimanches au golf et la lecture du Point ?
Moi j'ai eu la passion de la Commune de Paris par ma mère, qui refuse d'entrer au Sacré-Coeur depuis le jour où elle a appris son histoire. J'ai su qui était Victor Schoelcher bien avant de voir son nom en cours, et j'ai regardé "Racines" quand j'étais petite. Tout ça est revenu en flots successifs à 15 ans, lorsque je chantais L'Internationale dans les manifs contre la guerre en Irak. Depuis, je me sens tellement de gauche que je sais la vraie passation de ma grand-mère : à 11 ans, j'ai répondu que c'était de m'avoir appris le tricot ; mais à 23 ans, je répondrais que c'est de m'avoir, comme sans faire exprès, comme ça en passant, appris la révolte.
"On ne choisit pas son enfance, on m’a pas laissé être droitier
Mon père m’emmenait jamais au square mais aux réunions de comité
Mon père était tellement de gauche qu'on habitait rue Jean Jaurès
En face du square Maurice Thorez avant d’aller vivre à Montrouge.
On a été en Urss l’hiver, les pays de l’Est c’est mieux l’hiver
On voit bien mieux les bâtiments, les nuances de gris ça flashe sur le blanc
Devant la statue de Lénine, pour nous c’était le grand frisson
Moins 24 c’était pas terrible mais les chapkas étaient en option
Mon père était tellement de gauche que quand est tombé le Mur de Berlin
Il est parti chez Casto pour acheter des parpaings.
On mangeait des Lenin’s burger, fallait vraiment faire attention
Il y avait du choux, une pomme de terre, la viande elle était en option
On achetait du coca Kolkhoze, approuvé par le comité
Ça devait soigner la silicose, on s’en servait pour désherber
On regardait pas la contrebande, on regardait pas la corruption
La Sibérie c’était disneyland, le discernement en option.
Mon père était tellement de gauche qu’à son mariage dans l’église
On chantait l’Internationale, les femmes portaient des faux-cils
Mon père était tellement de gauche qu'on a eu tout plein d’accidents
Il refusait la priorité à droite systématiquement.
Les copains se foutaient de moi tout le temps, car à l’école au premier rang
J’avais les lunettes de Brejnev et le dentier d’un Tupolev
Mon père était tellement de gauche qu’en 81 il croyait que ça changerait
J'sais pas quelle tête il aurait fait en 2002 en allant voter
Et même si tout ce que je raconte n’est pas tout à fait vrai
Le socialisme comme paradis, nous on y croyait
Mon père était tellement de gauche que lorsqu’il est parti
La gauche est partie avec lui."
vendredi 10 septembre 2010
C'est fragile L'extension de tes bras
C'est fragile Les cordes de ta voix
C'est fragile Le tissu de nos peaux
C'est fragile Le courant de nos eaux
C'est fragile Quand tu ne dis qu'un mot
C'est fragile Les ailes des oiseaux
C'est fragile On nait rien qu'une fois
C'est fragile Ca claque entre les doigts
C'est un courant très basse tension qui court sous ma peau sensible. En plein milieu de soirée, quand la miss s'est montrée presque à vif, si borderline, si décalée dans cette soirée, si fragile, elle m'a fait sentir l'électricité qui me courait sous la peau. "On est restées un an ensemble, on s'est séparées il y a un mois". Tiens, je connais cette tête, et pour cause j'avais la même il y a un an et demi aussi. Toutes mes réponses sonnaient faux, sauf une : "l'autre ne t'attend jamais pour refaire sa vie".
Me sont revenus d'autres mots, "mais ça fait plus d'un an".
Après Philippe, je suis tombée amoureuse de Cam, mais je ne suis sortie avec personne entre février 2003 et septembre 2005. C'est à ce moment que je suis sortie avec 6kou, jusqu'en juin 2006, puis j'ai enchaîné avec Fred. Après Fred, il s'est passé un an avant que je sorte avec Bianca, en octobre 2007. Il y a donc eu le silence post-Philippe/Cam, et le silence post-6kou/Fred. Il y aura donc aussi le silence post-Bianca. Je me connais tellement bien que je sais que c'est loin d'être fini. On se surprend si peu soi-même, je m'auto-saoûle tellement.
Allez, j'me la ferme pour une fois. A d'autres le coup de la fragile, allez, salut !
mardi 7 septembre 2010
Il y a des gens que j'ai aimés, parfois après une semaine, parfois après un an, parfois après une heure. Parfois, je les ai aimés pour une semaine, pour un an, ou pour une heure. J'ai eu des amis éclairs, d'autres qui sont restés quelques années. Pour certaines personnes, j'ai su dès le départ qu'éphémère serait le mot, pour d'autres j'ai cru qu'on vieillirait ensemble. Mais pour toutes celles dont le chemin s'est séparé du mien, selon l'expression consacrée, je peux noter ce point commun : j'ai encore tant à vous dire. Je paie maintenant l'addition salée, très salée, de n'avoir jamais su exprimer mes sentiments. Pourquoi pourquoi pourquoi pourquoi. C'était pourtant si simple, enfin de ma place actuelle sur ma putain de chaise de bar rouge, devant ce putain d'ordi, ça me semble si putain de simple.
Il ne s'agit pas seulement de leur dire que je les ai aimés. Le foutoir d'une tête ne se limite pas à ça. J'aurais aimé dire plus violemment le mal que certains m'ont fait. Pour celles qui ont changé ma vie, j'aurais aimé leur dire aussi, voilà tu es désormais propriétaire d'une partie de moi, tu as des actions sur ma vie, et ça me crée des délices insoupçonnés. Et même. Et même. M'excuser auprès de ceux et celles que j'ai blessés. Les deux à qui je pense me poursuivent à travers la culpabilité qui refuse de disparaître. I'm longing to say je regrette de t'avoir fait ça, mais j'ai changé en comprenant ta peine.
Par contre, j'ai beau avoir compris MA peine lorsque je ne dis rien, ce n'est pas pour autant que j'ai changé sur ce point. Trop souvent encore, il y a des mots qui ne franchissent pas la barrière labiale, je suis bien ici, je suis bien ici avec vous, je suis bien ici avec vous et si j'avais le choix je n'irais pas ailleurs. J'ai passé deux mois avec des personnes que j'ai trouvées drôles, intelligentes, sympathiques, parfois tout ça à la fois, avec ce petit plus qui fait l'alchimie. Lorsque je m'ennuyais, c'était de leur absence. Et je n'ai jamais réussi à leur poser cette simple question : on se revoit ?
Alors forcément, quand la chanteuse de Pink Martini étire les voyelles à l'infini dans Brazil, je ferme les yeux, je pleure, et je danse ma tristesse. Je me revois les fins de journée, quand je mettais cette chanson en boucle pendant que je nettoyais la salle. Je repense à ces fragments de discussions entre deux clients, deux plateaux, attends j'arrive, tu reviens prendre un café ? Et surtout je repense au ridicule de l'école primaire, qui finalement n'est peut-être pas si ridicule : tu veux bien être mon ami ? Finalement, ça se trouve, il n'y a que comme ça qu'on ne regrette rien. Mais Pink Martini continue de chanter en boucle qu'ils ont encore un million de choses à se dire.
Moi aussi, j'aimerais chanter de la même façon mes regrets.
http://www.deezer.com/listen-2715759