Il devrait y avoir plus de filles dans le monde. Ou alors, plus de films devraient parler de filles. Ou les filles devraient toutes davantage ressembler à des filles. Ou faire quelque chose pour tout repeindre dans des couleurs de fille, du rose si vous n'aviez pas compris.
Je vois déjà les sourires se dessiner sur vos visages. Ce n'est pas ma faute, si mon monde est féminin.

Dans ma famille, j'ai principalement des cousines, et je m'entends très bien avec toutes. Du côté de mon père, j'ai cinq tantes et deux oncles ; du côté de ma mère, davantage d'oncles, mais je ne vois que la tante. Ma grand-mère paternelle a élevé seule ses enfants, ce qui en a fait une femme forte dont la figure plane encore sur la famille. Ma grand-mère maternelle, bien que vivant à 300 km, est présente à la maison tous les jours, par la seule existence de ma mère qui n'a jamais coupé le cordon.
Ce n'est pas une famille de femmes, comme peuvent l'être certaines familles (la généalogie colinienne), mais elles y tiennent une place plus décisive que celle des hommes.

Toute ma scolarité fut féminine. En primaire, je ne parlais aux garçons que pour leur dire d'apprendre à lire. Au collège, les garçons ont été éliminés par le collège non-mixte. Je devais bien en fréquenter quelques-uns à l'athlétisme, mais, sans surprise, je préférais la soeur s'il y en avait une.
En toute franchise, vivre dans un bocal féminin à cet âge-là, c'était une moitié de désastre : entre les jalouses, les purement méchantes, les pouf-en-devenir, l'ambiance était sportive. Ca m'a tout de même aidée à me blinder contre toutes les bassesses possibles entre filles. Et puis surtout, j'étais bien contente d'être à l'abri des garçons : maladivement timide comme je l'étais, maladroite comme j'agissais, ce qui me terrorisait par-dessus tout était le contact masculin.
Je me souviens de la rentrée de seconde comme de celle qui m'a demandé la plus grosse préparation psychologique. J'ai davantagé été angoissée à l'idée d'avoir des garçons dans ma classe, qu'à l'idée de foutre en l'air tous mes week-ends pour la prépa. C'est pour dire. Pourtant, ils étaient peu nombreux, peut-être sept ou huit sur trente élèves.
Mais heureusement pour l'héroïne de cette article, elle est passée en littéraire ! Là où on ne trouve que deux specimen XY par classe, à gérer au quotidien jusqu'au bac. On a eu chaud ! Après le bac, le topo est presque identique, car je n'ai jamais eu une classe composée de plus d'un tiers de garçons.

Et ce n'est pas plus mal, car mon univers est féminin. J'aime les artistes femmes, j'aime les oeuvres qui parlent de femmes, j'aime avoir des amiEs plutôt que des amis. Je trouve quelque chose de terriblement.. séducteur à la moitié de l'humanité laissée hors de l'Histoire.
Mon univers est tellement féminin que même mes études concernent les femmes. Pour mon master d'histoire, je veux travailler sur les prises de voile pendant la période romantique, c'est-à-dire la décision d'entrer dans un couvent et la cérémonie qui va avec. Si je suis prise également à l'Ehe*s, je vais travailler sur Ni putes ni soumises, des femmes d'un autre syle, dira-t-on.
Ce n'est pas que j'élimine les hommes, mais je les ai toujours cantonnés à la sphère amoureuse. Les exceptions en sont rares et récentes. Dans l'état actuel des représentations que l'on se fait du masculin et du féminin, ce qui est associé aux hommes ne m'intéresse pas le moins du monde. Face à la promotion de la force en haut de l'échelle sociale, mon coeur balance pour les chemins détournés et plus subtils, la souplesse et l'humanité, qui ne devraient jamais rester du côté féminin.
C'est tout mon engagement, politique et quotidien.

Et tout ça, parce qu'hier j'ai vu "Caramel", un film de femmes. Un film émouvant, séduisant, intelligent. Un film de femmes.
XX est une combinaison qui m'inspire.