Un pas après l'autre, les yeux qui s'agrandissent, mise au point. C'est bien lui ? Une fois, deux fois, trois fois. Il se trouve sur mes pas. Et toujours au moment où je ne m'y attends pas, comme si j'étais destinée à le rencontrer par hasard.

Et ça m'amuse, j'aime ça, je l'aime bien lui. Pourtant, je le connais depuis très peu de temps. Est-ce-que je peux même dire que je le connais, en dépit de l'année passée à ses côtés ?
On est dans la même classe, dans la même option. Malgré tout, ça doit faire uniquement trois ou quatre mois que je lui parle. Il y a eu cette première prise de contact "Dis-moi, tu connaîtrais pas un certain Matthieu ?" et la première discussion avec lui qui s'en est suivie. Les cours où il arrive à moitié en retard, cherche une place du regard, trouve une place libre à côté de moi. Les conversations à la volée, à la fin des cours de spé, et les chuchotements volés pendant les cours de lettres.

Et il reste le seul de la classe que j'ai croisé autant hors des cours, le seul que j'ai croisé, tout simplement. Une fois, sur le quai de la ligne 4, alors qu'on avait fini les cours depuis longtemps. Une fois, pendant un concert des Ogres de Barback à Cergy, alors que j'étais avec d'autres amis "Tiens, je connais ce blouson" et les discussions sur le quai du Rer où je l'ai retrouvé, longtemps après la fin du concert.
Puis tout à l'heure, peut-être l'apparition la plus surprenante : de nouveau sur le quai de la ligne 4, croyons à la force d'attraction du lycée, je l'ai croisé, alors que j'avais passé la journée à regretter de ne pas lui avoir demandé de venir à la Bnf avec moi.

J'aime pas être seule. Et aujourd'hui, je me sentais bien seule. Celui qui aurait dû être avec moi, à la Bnf, jouait son monarque lumineux dans les allées d'un château rive gauche. Au bras d'une courtisane, qui sait ?

Il est 22h25, et pas de nouvelles depuis midi.
J'aurais définitivement dû inviter Tristan.