C'est à s'émerveiller comme les clichés n'en sont pas. "La permanence dans le changement", "la continuité dans la rupture", tout ça tout ça. Mais la réalité n'adhère peut-être pas tout à fait à ce cadre, à bien y réfléchir. La réalité, c'est que je m'émerveille d'être la même, si merveilleusement la même, si prévisiblement la même, après tout ce temps. Si rupture ou changement il y a eu, cela n'a été que dans le regard que je me porte, sur mes actes, mon caractère, mes choix. Mais moi, moi, moi, oui toujours moi, je suis la même. J'ai les mêmes amis, les mêmes idées, les mêmes faiblesses, les mêmes passions, les mêmes lubies. Mais, lentement, je ne me déteste plus, je ne me mets plus de bâton dans les roues. Oui, la tortue née du lièvre ne se trouve plus si monstrueuse. Rapatriement de ces bouts de moi laissés sur le chemin, rapatriement de ces souvenirs éparpillés aux quatre vents, rapatriement de moi à moi. Puisque JE décide, puisque JE suis, puisque J'écris, puisque JE choisis mes mots, JE sais ce que JE dois faire : finir ce que j'ai commencé. Oui, je mets fin à ce que j'ai commencé, en ne me réinscrivant pas à l'Ehess, en ne me réinscrivant pas en études supérieures, nulle part. Je rapatrie les lambeaux que je croyais attachés à mes études : revenez, revenez, vous êtes moi, aussi. Je ne suis pas uniquement mes études, je suis moi avant tout, et peu importe le narcissisme qui me rend si heureuse.
Des sacs et un carton à dessins traînent sous mes yeux, rapatriés de mon ancienne chambre.
C'est à s'émerveiller de la joie provoquée par les souvenirs qui s'y trouvent. Je suis tous ces souvenirs qu'il était inutile de combattre. Rien à caler de les accumuler, ils ne représentent plus aucun danger. Ils ne sont plus des tentations nostalgiques, ils ne sont que les preuves que ma vie est géniale.

Et que j'en veux encore.