Ma mère : "Te rends pas malade si il gagne !"

J'ai 19 ans, pas de famille à nourrir, pas de voiture à payer, pas de patron sur mon dos, en bref pas de vie quotidienne à me coltiner. Par conséquent, je me réserve le droit de penser que ma vie tourne autour des élections présidentielles, et que mes belles idées sont le centre du monde.

Aujourd'hui, je me suis passée en boucle mes deux chansons de rebellz-baba-cool-de-la-vie (parce que je le vaux bien) : Fils de France, et Here's to you. Ca a accompagné ma journée de la désespérance. J'ai tracté pour Royal ce matin entre 10h et 12h au marché d'Alexandre Dumas, autant dire un lieu presque déjà acquis au PS. C'était plutôt sympathique pour commencer, car je n'avais jamais tracté de ma vie, et les réactions étaient plutôt encourageantes, bien que toutes désespérées.
A quoi bon se jeter dans la bataille quand tout donne l'autre schizo gagnant ?

Peut-être que la clé est justement là. Seul l'Ici et Maintenant comptent, alors je crois que j'ai décidé de me jeter, car je n'ai que ça à faire. Je ne crois pas en Dieu, je ne crois en rien d'autre qu'en mes cours d'histoire et ma (maigre) expérience, qui me dictent ce choix : il ne s'agit pas d'adhérer à une ligne partisane, mais de confondre mon être et mes convictions. C'est pour ça que je considère ces élections comme si importantes dans ma vie personnelle. Demain, ma mère m'offense personnellement en n'allant pas voter. [Edit] Elle a voté Royal finalement !
L'autre schizo, qui sera élu à presque tous les coups, va gouverner de mes 20 ans à mes 25 ans.
Autant dire le coeur de ma vie, car son commencement.

Alors que la vie débutait avec la fin de la prépa, j'ai comme l'impression que quelqu'un a décidé d'en faire une tragicomédie du militantisme (ET LA PUTAIN DE BORDEL LE MOT "TRAGICOMEDIE" EST UTILISE A BON ESCIENT PAS COMME L'AUTRE CRETIN INCULTE AUX 3 MOTS DE VOCABULAIRE QUAND IL PARLE DU DEBAT ROYAL-BAYROU). Une tragicomédie, car rien ne peut m'empêcher au fond d'avoir une vie heureuse, même sur fond de tragédie politique. Et puis ce n'est pas comme si je portais une admiration sans bornes à Royal.

Simplement, c'était la gauche au second tour. Quelque chose que je vis pour la première fois avec cette intensité, comme si la/ma vie pouvait réellement changer.
Et oui, on est jeunes, on est beaux, on est tout puissants. Et je veux tout changer. Pendant qu'il en est encore temps, avant ce grand renoncement systématisé qu'est la vieillesse. Pendant que j'y crois encore.

Je suis définitivement née 40 ans trop tard, à l'âge du désenchantement, en chantant à tue-ête "Désenchantée" à 8 ans, alors même que je ne pouvais pas en comprendre les paroles. Maintenant, je ne les comprends que trop bien. Je fais partie de ces exceptions qui confirment la règle, et qui ont le culot (l'audace) de croire qu'ensemble tout est possible.. Au sens fort et sincère.

J'aurais dû naître à l'époque où on chantait Dylan, et Baez, et Joplin, le coeur dans les cordes vocales.

Here's to you Nicolas and Bart
Rest forever here in our heart
The last and final moment is yours
That agony is our triumph

(Joan Baez)


Je suis une jeune et conne. Lui est vieux et fou.
La vie est si simple, si belle.

Je répondrai présente au 3e tour. Dans la rue.

[ Bande Son ]